Je ne veux pas devenir comme eux

Un blog, en dehors de participer à "huiler" votre communication, comme le font plus ou moins bien certaines personnalités politiques, c'est aussi parfois un défouloir.

Non pas que mes discours, à l'occasion des voeux ou de diverses cérémonies ou manifestations, soient lisses et dénués d'idées ou principes forts, car je pense en avoir déjà fourni maintes fois la preuve,... il est vrai cependant que, malgré un entourage actif et prévenant, je ressens parfois une solitude pesante à fréquenter certains élus.

"Fréquenter" n'est pas grave en soi, puisqu'on fréquente toutes les composantes de la société quand on est maire (ce qui n'est pas automatique pour d'autres mandats), non, ce qui est grave, c'est, lorsque l'on essaie de contribuer à construire une société plus juste, d'élaborer un projet et une vision du territoire, c'est de se heurter à des visions étriquées, au cynisme, au mépris, à la suffisance et parfois même à l'ignorance.

Je dis bien souvent que l'on a "les élu-e-s qu'on mérite".

C'est vrai dans un sens, tant les citoyens se renseignent peu avant de voter, quand ils usent encore de ce droit ou le considèrent, à raison, comme un devoir.

C'est faux dans un autre sens, car le fonctionnement général de nos institutions déforme mécaniquement le processus démocratique.

S'il faut bien sûr de la compétence et de l'investissement personnel, l'émergence d'une "classe politique" en France depuis la deuxième moitié du vingtième siècle est un fait notoire et exécrable.

Ce poison se diffuse à tous les étages de la vie démocratique, infectée par une oligarchie détachée des préoccupations quotidiennes des citoyens.

Combien sont-elles, combien sont-ils, à n'avoir jamais connu l'expérience d'un métier autre que leurs collaborations ou leurs mandats politiques ? Combien sont-elles, combien sont-ils, élus locaux exaltés par le moindre pouvoir et certains d'être "au-dessus" de leurs concitoyens ?

Je suis fier d'avoir toujours mon indépendance professionnelle par rapport à ce "milieu". Je suis fier de travailler au service de mes concitoyens sans jamais considérer que ce sont "les miens" mais plutôt que je sois "leur". Le rejet de cette classe politique est un phénomène normal. Je le trouve même particulièrement sain, il prouve la lucidité du regard de la société dans son ensemble. Mais dès lors, que faire ?

- Le statut de l'élu est à réformer profondément pour que une égalité d'accès à la représentation citoyenne

- La formation des élus, comme le vote, devraient tous deux être rendus obligatoires

- La condamnation d'un élu devrait prononcer son exclusion de la vie politique

- Les modes de scrutin doivent intégrer la proportionnelle, voire des modèles nouveaux, sur lesquels Condorcet travaillait déjà en son temps

- La gouvernance des institutions devrait être plus collégiale, collective, et transparente

Cette liste non exhaustive prouve l'existence de solutions. Mais nous nous doutons bien qu'une oligarchie bénéficiaire du système actuel n'y a pas intérêt.

La "révolution citoyenne", si elle est nécessaire, est possible sans feu ni sang. Il convient de commencer par participer aux votes après s'être renseigné sur les candidats : la richesse de leurs parcours, leurs comportements, leur ouverture, leur capacité à travailler avec tout le monde...

Evidemment en tournant le dos à l'illusion grosse comme une montagne que le Front National entretient, pour nous retirer ce qui nous reste de démocratie. C'est tellement plus facile de détruire.

Transformons plutôt, chacun, nos espoirs de justice en une reconstruction, par la base, morceaux par morceaux, de l'idéal démocratique qui s'est effondré.

C'est harassant, c'est fatiguant, mais c'est normal : le plus grand ennemi de la démocratie, c'est la paresse.